Barocland

« Encore une petite » pensa  Eugène. Le mouton bipède craqua une petite allumette et n’entendit pas les autres petites allumettes pleurant leur sœur nouvellement disparue. Avec la petite flamme, Eugène alluma la cigarette au thé qui pendait à ses lèvres, et il pris une bouffée de thé… Il était assis sur un banc, de manière nonchalante, et regardait autour de lui tout en voguant sur le fil de ses pensées. Derrière lui, le commissariat semblait paisible, et la rue le semblait encore plus. Une fin d’après-midi paisible en somme. Propice à la réflexion. Mais tout d’abord au repos, selon Eugène, qui venait de passer une partie de son après-midi à feuilleter les cahiers de ventes du libraire aux côtés d’un John silencieux et rongé par l’angoisse. Qui plus est, la table sur laquelle ils avaient travaillé était bancale et puait l’eau de javel. Et pour se reposer, rien ne valait une tasse de thé, enfin, une cigarette de Barocland.

Eugène n’arrivait pourtant pas à se détendre. Ses recherches avec John avaient révélé quelque chose de troublant : le livre, le fameux livre, ce mystérieux livre « And You Too », n’avait été vendu que deux fois depuis l’ouverture de la librairie de la rue Kenna il y a six ans de cela. Une fois à John, et la fois précédente, cinq ans auparavant exactement. La veille de la disparition de Warwick Friman… Les deux compagnons avaient donc été très étonnés que le libraire ait ommis cette vente à Auguste. Enfin, il l’avait probablement oubliée. De la même manière qu’il leur avait dit qu’il ne se souvenait pas de ce livre. John avait donc eu l’idée de consulter le cahier d’inventaire du libraire, après avoir obtenu son accord. Et là, ce fut la surprise la plus totale : « And You Too » n’y était pas répertorié, ni même sa cote, et il n’y avait pas d’autres exemplaires actuellement sur les rayons de la boutique.